Vivre la ville en toute autonomie devrait être évident pour chacun ; mais cela demande des aménagements de la cité et nous sommes loin du compte. Un colloque intitulé « Mieux vivre la cité, l’accessibilité pour tous » dressait, les 19 et 20 février derniers, le tableau de ce qui reste à faire et lançait quelques pistes.
Plus de 40 % de la population française - 22,5 millions de personnes - déclarent dans une enquête récente [1] être affectés d’une déficience ; mais le nombre des personnes reconnues officiellement handicapées est estimé, lui, à 3,5 millions. C’est peut-être avec ces chiffres en tête que la ministre de l’Emploi et de la Solidarité, Élisabeth Guigou, a annoncé, lors du colloque de l’Unesco, l’unification, « dès cette année » du système d’évaluation des handicaps, donc des Commissions techniques d’orientation et de reclassement professionnel (Cotorep), jusqu’à présent réparties entre la direction de l’Action sanitaire et sociale et celle de l’Emploi.
Le Groupement pour l’insertion des personnes handicapées physiques (GIPH) avait été fondé en 1964. Une loi portant diverses mesures destinées à favoriser l’accessibilité aux personnes handicapées des locaux d’habitation, des lieux de travail et des équipements publics avait été édictée en juillet 1991. « Chacun doit pouvoir se déplacer en voiture, prendre l’avion, le train, les transports collectifs, mais aussi partir en vacances, pratiquer un sport, accéder à la culture et aux loisirs », avait renchéri Jospin lors du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH) du 25 janvier 2000. La même année, le Comité de liaison pour l’accessibilité du cadre de vie (Coliac) [2] remplaçait d’ailleurs celui pour le transport des personnes handicapées (Colitrah), avec un champ d’action élargi. Mais nous sommes encore loin du compte : « Beaucoup reste encore à faire avant que l’intégration des personnes à mobilité réduite dans l’ensemble des secteurs de la vie ne soit une réalité », avoue en conclusion le rapport de la déléguée ministérielle à l’Accessibilité (ça existe donc ?), Catherine Bachelier, intitulé Évolution de l’accessibilité au cours de l’année 2001 et rendu fin 2001 au ministre des Transports et du Logement.
Une évaluation des actions menées par le Fonds interministériel pour l’accessibilité des bâtiments publics aux personnes handicapées sera rendue publique au printemps prochain. Des « sites pour la vie autonome » devraient se généraliser pour faciliter les aménagements des lieux ordinaires de vie et accélérer les aides techniques. Mais cette notion d’accessibilité renvoie aussi aux aides humaines : 3 000 nouveaux postes d’auxiliaires de vie dans le cadre du plan triennal ou 250 places annuelles de services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), par exempleÉ Sera-ce suffisant ? A suivre, au plan de l’efficacité.
Et l’accès à l’école et à l’université ?
Quatre mille élèves handicapés supplémentaires seront accueillis à la prochaine rentrée scolaire. Initié en 1999, le plan Handiscol doit permettre la création de mille nouveaux emplois d’auxiliaires de vie scolaire à la rentrée 2002. Actuellement en préparation, la carte scolaire devra intégrer la création de classes d’intégration scolaire (CLIS) dans les écoles et d’unités pédagogiques d’intégration (UPI) dans les collèges et lycées. Réformées, les commissions d’éducation spéciale (CDES) sont sommées d’élaborer des projets d’intégration des élèves avant toute décision vers une institution spécialisée. Et depuis avant-hier 5 mars, la charte Handiscol s’affiche en principe dans tous les établissements scolaires [3].
Par ailleurs, un plan intitulé Handisup concerne - pour la première fois - l’accueil des étudiants handicapés à l’université. Un guichet unique d’admission regroupera les démarches administratives et pédagogiques ; un plan pluriannuel de mise en accessibilité doit être élaboré par chaque université. Les aides techniques, pédagogiques adaptées seront développées, et les étudiants engagés dans une action durable de solidarité pourront faire valider cette expérience dans leur cursus de formation.
Installée en mai 2001, une commission Culture - Handicap [4] s’est réunie pour la seconde fois le 7 février dernier et a émis quelques propositions : inscription de la culture dans les projets d’établissement des institutions médico-sociales, concertation avec les écoles d’architecture, accueil adapté dans les établissements culturels, formation des acteurs culturels aux questions du handicap, etc.
Plus globalement, la ministre déléguée à la Famille, à l’Enfance et aux Personnes handicapées, Ségolène Royal, évoque actuellement « un système d’allocation plus universel et personnalisé que celui d’aujourd’hui, une « allocation personnalisée du handicap », inspirée de ce qui a été réalisé pour l’allocation personnalisée d’autonomie (APA) destinée aux personnes âgées ». A suivre.